Salut arqueo inquiets! Aujourd’hui nous allons nous entretenir avec Alain Campo, le numismate de l’équipe, qui va nous expliquer en quoi consiste son métier.
Tout d’abord, peux-tu te présenter très brièvement?
Je m’appelle Alain Campo, j’effectue actuellement un doctorat en cotutelle à l’UPPA et à l’UPV et je travaille sur le monnayage antique et du haut Moyen Âge entre l’Èbre et la Garonne.
Tu es un jeune chercheur mais qui a déjà de l’expérience dans le secteur numismatique. Peux tu nous dire en quoi consiste le métier de numismate?
Tout dépend du point de vue de chacun. Pour certains, être numismate consiste à collectionner des monnaies, pour d’autres il faut savoir identifier pour classifier et collectionner ses monnaies comme le faisaient les cabinets de curiosités et les sociétés savantes vers les XVIIe-XXe s. Il y a aussi des particuliers ou des sociétés qui vivent en achetant et revendant des monnaies, en privilégiant la qualité de conservation et la rareté de chacun de ces artefacts. Concernant l’aspect académique, le métier de numismate est tout aussi varié. Certaines recherches concernent l’image et la propagande véhiculée par la monnaie, d’autres travaillent sur les données statistiques, sur la métrologie, sur l’analyse métallographique, sur les procédés de fabrication, sur l’amélioration de la datation des monnaies, etc.
Actuellement, l’approche archéonumismatique se développe. Être archéonumismate consiste à utiliser toutes les données archéologiques (stratigraphies, études de mobiliers, etc.) en les associant aux données numismatiques. Cela permet de mieux appréhender les sites et les sociétés par le biais des pratiques monétaires et de l’usure des monnaies.
Et pourquoi c’est intéressant d’étudier les monnaies en archéologie? Quelles sont les informations que nous pouvons obtenir en étudiant la monnaie?
Les données sont multiples et dépendent de la qualité de la fouille et de la physionomie du site en fouillé. Les fouilles anciennes ne nous apportent que très rarement des données stratigraphiques, informations importantes pour mieux appréhender la fonction et les pratiques monétaires du site. En revanche, des sites finement fouillés permettent d’analyser la répartition monétaire au sein du site mais aussi sa stratigraphie. Les contextes peuvent alors être datés parfois assez précisément quand nous retrouvons du mobilier associé et que nous étudions le degré d’usure de chaque espèce.
À cela, nous devons initialement effectuer une ventilation monétaire, répartition des émission par période, pour mieux comprendre les activité du site. Néanmoins cette méthode doit être nuancée car trop souvent les sites sont datés en fonction des émissions monétaires recueillies et non par rapport à l’utilisation de ces dernières qui ont parfois continuées à circuler plusieurs dizaines d’années après. D’autre part, certaines monnaies peuvent être utilisées différemment qu’à des fins économiques. Par exemple, nous retrouvons des spécimens troués qui ont généralement servis de pendentifs, de talisman, etc. Nous rencontrons aussi des monnaies cisaillées, numéraires démonétisés pour être offerts aux dieux dans des sanctuaires, des sites votifs, etc.
Toutes ces données rassemblées doivent être confrontées et mises en relation avec les autres données issues des études des mobiliers associés pour obtenir la vision la plus réelle du site et d’émettre les hypothèses les plus justes.
Et dernière question. Peux-tu nous expliquer comment se fait une étude numismatique? Quelles sont les étapes que tu suis?
Si l’archéologue a mis en pochette avec un numéro de référence chaque éléments, la première étape consiste à comptabiliser le nombre de monnaie car bien souvent, nous retrouvons des boutons, des ferreux etc. qu’il faut séparer. La seconde étape consiste généralement, si cela n’a pas été fait, de nettoyer mécaniquement chaque artefact. Puis, nous procédons à la métrologie (nous pesons, mesurons le module (diamètre), et notons l’axe des coins). Nous passons ensuite à l’identification de l’avers et du revers de la monnaie. Cette étape consiste à décrire précisément tous les éléments de l’avers et du revers en ayant noté par la même occasion les légendes associées. Une fois la description effectuée, nous devons retrouver l’identification de la monnaie dans des corpora de références.
Ensuite, nous passons à la classification par périodes de règnes et/ou par périodes chronologiques. Cela nous permet d’effectuer une ventilation monétaire pour comprendre l’activité du site. L’analyse de l’usure de chaque monnaie peut alors nuancer cette approche. Un commentaire pour chaque période monétaire et pour chaque espèce méritant une observation est alors rédigée. L’analyse de la répartition monétaire et stratigraphique permet ensuite de déterminer les activités avec les études de mobiliers associés et de préciser les datations des fréquentations du site. Les données statistiques peuvent ainsi être comparées avec d’autres sites présentant une ventilation monétaire similaire afin de mieux appréhender la fonction du site étudié. Pour compléter, nous devons rajouter toutes les données historiques pouvant être associées au site ainsi que les aspects géographiques, géologiques, topographiques, etc.
Si vous voulez connaître un peu plus les travaux d’Alain, nous vous laissons ici les lien de son profil Academia.
https://univ-pau.academia.edu/AlainCampo
¡Merci Alain pour le temps que tu nous as consacré!
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